Vind, Carl Rudolph Emil BREV TIL: Frijs, Christian Emil Krag-Juel-Vind FRA: Vind, Carl Rudolph Emil (1868-11-19)

Kammerherre Vind, Gesandt i St. Petersborg, til Udenrigsminister Grev Frijs.
St. Pétersbourg, 19/7 novembre 1868.

Monsieur le Comte,

J’ai eu l’honneur de recevoir par occasion les dépêches de Votre Excellence Nr. 6 & 7 du 4 dr., et je La remercie d’avoir ainsi facilité la tâche qui m’est imposée.

Dans l’entretien que je viens d’avoir aujourd’hui avec le Chancelier, j’ai exprimé à Son Excellence la reconnaissance du gouvernement du Roi de la démarche faite par Sa Majesté l’Empereur et par le prince Gortchacow à Berlin. J’ai ensuite expliqué au Chancelier les vues de Votre Excellence sur la situation de l’affaire en question, relativement à ma dernière conversation avec le Chancelier, en relevant l’inconséquence entre les paroles de monsieur de Bismark qui nous fait entrevoir la cession d’Als et de Duppel par l’intercession de S. M. l’Empereur, et celles du Roi de Prusse qui ne veut pas entendre parier de ces territoires. Pour appuyer mes paroles j’ai cru bien faire en lisant au prince une partie de la dépêche de Votre Excellence à commencer de: »Ce fut lui qui suggéra &c.« jusqu’à l’alinéa: »Ainsi, Monsieur, nous &c.«

Le prince me dit qu’il ne savait pas que monsieur de Bismark nous eût fait espérer de recouvrer Als et Duppel, mais qu’il savait que le Roi de Prusse s’y opposait. Le prince me dit même — et cela ne correspond pas avec les expressions du prince à mon dernier entretien avec Son Excellence — que le Roi de Prusse Lui-Même lui avait dit qu’Il ne céderait pas ces territoires. — Le prince me répéta ensuite qu’il avaits. 194trouvé le Roi de Prusse modéré, c’est-à-dire: désireux d’arriver à une entente avec le gouvernement du Roi, mais que Sa Majesté, du reste, ne s’était prononcée sur aucun détail.

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Je dois ici faire observer à Votre Excellence que, lorsque le prince Gortchacow, comme j’ai eu l’honneur de le rapporter dans ma dépêche du 16/4 octobre, m’a parlé des garanties, en me disant que nous pourrions consentir à quelques garanties en dehors de celles contenues déjà dans les lois du pays, c’était un avis général du prince sur cette question qui ne contient aucun conseil à faire de nouvelles concessions outre celles que M. de Quaade a déjà été autorisé à faire à Rerlin. Le prince Gortchacow n’assume pas, non plus, la responsabilité de nous conseiller directement de nous déclarer prêts à renoncer à la cession d’Als et de Duppel; il énonce seulement sa conviction que le Roi de Prusse ne cédera jamais ces territoires.

Le prince a fait ensuite la remarque que nous n’avions pas de confiance en le gouvernement prussien. A cela j’ai répliqué qu’il était difficile, après ce qui s’est passé jusqu’à présent, d’en avoir, monsieur de Bismark disant une chose et le Roi de Prusse une autre. — Le reste de ma conver- sation avec le Chancelier n’a été qu’une répétition de mon entretien déjà rapporté. En haussant les épaules le prince m’a répété qu’il n’y avait qu’à attendre; qu’il ne pouvait faire plus que ce qu’il avait déjà fait, qu’il fallait voir ce que ferait M. de Quaade à Berlin. — »Ni vous ni moi«, dit le prince, »nous ne pouvons rien faire«.

Sur ma demande, s’il n’avait pas fait de communication au baron Mohrenheim relativement à cette affaire, le prince Gortchacow m’a dit que monsieur de Mohrenheim était mis au courant de tout.

Je profite d’un courrier français pour faire arriver cette dépêche à Votre Excellence par Berlin.

E. Vind.

Depeche Nr. 30, modtaget 25. November 1868.